lundi 23 décembre 2013

Le tavy

La principale menace qui pèse sur les forêts malgaches est la pratique du « tavy ». «La culture itinérante sur brûlis» ou tavy est la forme de gestion de terre la plus utilisée dans les zones forestières intertropicales. C'est un système plus adapté dans ces régions à cause de la faible pression démographique et du libre accès aux terres. Cette pratique nourrit entre 250 et 500 millions de personnes dans le monde. Pour les zones forestières intertropicales, elle concerne environ 30% des terres exploitables.
Le tavy consiste à convertir des espaces forestiers primaires ou secondaires en terres ou parcelles de cultures de subsistance comme le riz pluvial, le maïs, le manioc, la banane.
Cette conversion passe par 3 principales phases avant la mise en culture des terres : l'abattage, le séchage et le brûlage.
L'agriculture sur brûlis est souvent associée à l'abattage et aux incendies, conduisant à la destruction des forêts primaires, mais la plupart des cultures sur brûlis se font aujourd'hui dans les forêts secondaires. Il peut être «pionnier» lorsque l'abattage concerne les forêts primaires, avec retour à la friche après épuisement des sols ou «cyclique» lorsque ce sont les forêts secondaires qui sont abattues et remaniées, avec jachère en rotation. Un tavy s'étend généralement sur une étendue de 0.5 à 4 ha (avec une moyenne de 1 ha). L'abattage commence au mois de Juillet et la mise à feu en Septembre.

Cette coutume ancestrale est encore très répandue à Madagascar parmi les paysans. Le faible coût de main-d'œuvre, la faible fertilité du sol des rizicultures, et la réduction de la taille des parcelles transmises (à cause de l'accroissement de la population) entraîne les paysans à chercher de nouvelles terres cultivables dans les forêts. Le tavy est un moyen ambivalent d'appropriation et de sécurisation de nouvelles terres.

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mardi 15 octobre 2013

La coévolution : se reproduire à tout prix

Pour assurer leur pollinisation, les orchidées utilisent de multiples stratégies pour attirer l'insecte pollinisateur. Le souimanga, oiseau malgache, pollinise des orchidées du genre Satyrium en venant se nourrir du nectar produit par la fleur.
Stanhopea graveolens émet une forte odeur attirant des moucherons dont la présence suscite l'appétit des araignées, elles-mêmes capturées par le colibri pollinisateur. Les fourmis attirées par un nectar secrété par l'orchidée lui apportent une protection contre les insectes et autres prédateurs.
Les racines entremêlées des Gongora et le pseudo bulbe creux de Myrmecophyla tibicinis servent de nid à des fourmis. Dans cette relation à bénéfice réciproque, l'orchidée propose le gîte et le couvert aux fourmis qui réalisent la protection et la pollinisation de leur plante-hôte.

La coévolution décrit les transformations qui se produisent au cours de l’évolution entre deux espèces à la suite de leurs influences réciproques. Le phénomène de coévolution est souvent observé dans les relations entre les parasites et leurs hôtes, il s'agit de coévolution compétitive, mais il existe aussi de nombreux cas de coévolution coopérative, par exemple dans les cas d'interactions durables évoluant éventuellement vers la symbiose entre deux espèces.

Les processus coévolutifs ont été modélisés par Leigh Van Valen sous le nom de "théorie de la Reine Rouge" pour insister sur le fait que les interactions entre organismes conduisent à des courses évolutives permanentes.

Stanhopea graveolens

mercredi 9 octobre 2013

La biodiversité de Madagascar

L'isolement et les climats extrêmement variés de l’île ont donné naissance à une faune et une flore extrêmement variées. Cette biodiversité est aussi caractérisé par sa fragilité, en raison du caractère insulaire de l'évolution des ces espèces, la concurrence avec les espèces invasives est souvent favorable à ces dernières.

Les lémuriens sont endémiques à l'île depuis qu'ils y ont débarqués en provenance de l'Afrique il y a probablement 25 millions d'années. Aujourd'hui, on recense une quarantaine d'espèces. Le reste des mammifères compte une quinzaine d'espèces dont peu de prédateurs (5 espèces de petites tailles).
Madagascar abrite aussi environ 300 espèces de reptiles dont la grande majorité sont endémiques (citons la famille des caméléons répartie en trois genre sur une grande partie de l'île), 300 espèces d'amphibiens endémiques ne comptant que des grenouilles, 258 espèces d'oiseaux dont 115 sont endémiques.
Les insectes sont aussi présents en grand nombre, des centaines d'espèces sont encore à décrire.

La flore est très riche regroupant environ 12 000 espèces recensées en 180 familles. Sur 170 espèces de palmier, 165 ne sont présentes que sur l'île (par comparaison, L'Afrique ne possède qu'une soixantaine d'espèces de palmier), dont le fameux Ravenala madagascariensis, l'emblème du pays. Le Raphia revêt aussi une importance particulière pour la population : ses feuilles sont utilisées pour la construction, notamment les toits des maisons traditionnelles, et la production d'alcool de palme. Les fibres de raphia sont extrêmement solides et servent aussi à la confection, confection de paniers, chapeaux et même de meubles.
Sur les huit espèces de baobab existant au monde, six sont endémiques dont la plupart poussent sur la côte Ouest de l'île. La Famille des Orchidacées est présente à hauteur d'environ 1000 espèces dont 8 % sont endémiques, comme le genre Cymbidiella.
La famille des Apocynacées, avec la pervenche de Madagascar, Catharanthus roseus, a elle aussi une importance économique depuis qu'elle intéresse les laboratoires pharmaceutiques. On en extrait environ 90 alcaloïdes dont la vincristine et la vinblastine qui permettent le traitement des leucémies avec des résultats formidables sur les leucémies infantiles. Malheureusement, comme souvent, les laboratoires pharmaceutiques ne rétribuent pas l'état et les populations locales à hauteur des bénéfices réalisés.

Pour conclure sur l'endémisme malgache, citons un des écosystèmes particulier à l'île, les forêts épineuses de Didieracées. Ces forêts se trouvent à la pointe sud, et sont constituées d'espèces endémiques dont la plupart appartiennent à la famille des Didieracées, la majeure partie étant des Alluaudia procera.
Ces plantes se présentent sous la forme de troncs dressés d'une hauteur de 10 à 15 mètres, peut ramifiés couvert d'épines et de petites feuilles vertes durant la saison des pluies. D'autres plantes de plus petites tailles comme les Pachypodium et des Herbacées, plusieurs espèces de lémuriens dont les sifaka viennent compléter cet écosystème aussi bizarre que menacé.

Forêts épineuses de Didieracées

mercredi 12 juin 2013

L'arbre du voyageur

Originaire de Madagascar, l'arbre du voyageur, Ravenala madagascariensis, fait partie de la famille des Strelitziacées. Ravinala est le nom malgache de l'arbre. Son nom vernaculaire dans les langues occidentales viendrait du fait que l'eau conservée dans la gaine foliaire à la base de ses feuilles permet au voyageur de se désaltérer (malgré les insectes et les feuilles mortes s'y trouvant...). Un coup de machette sur la base du tronc fait couler une sève particulièrement liquide dont le gout est proche de l'eau. Il est possible de récupérer un litre par coup de machette après la saison des pluies, quand l'arbre est gorgé d'eau.

Ce n'est pas un arbre, mais une plante herbacée au stipe lacunaire, ce qui le fait parfois ressembler à un palmier. De par sa forme et sa taille, il se repère de loin. Adulte, le stipe mesure environ dix mètres de hauteur, ce qui porte sa hauteur totale à environ 20 m. Ses vastes feuilles sont disposées en éventail, dans un même plan. Leur base en forme de coupe retient l'eau de pluie dans laquelle de nombreux moustiques viennent pondre. A Madagascar, ces réservoirs d'eau hébergent des espèces très originales qui sont inféodées à ce microhabitat (batraciens, coléoptères et moustiques). Lorsqu'il fleurit, il produit de grandes fleurs blanches, à 3 sépales, 3 pétales et 6 étamines, dans des spathes de 15-20 cm. À Madagascar, la floraison commence en septembre. La pollinisation est assurée par les chauve-souris et les lémuriens.

Sur la côte Est de Madagascar, ses différentes parties sont utilisées comme matériaux pour la construction des cases végétales traditionnelles, fraîches et fonctionnelles. Les pétioles fendus, appelés falafa, servent à confectionner des panneaux muraux. Les feuilles une fois séchées, appelées raty, sont utilisées pour la réalisation des couvertures et enfin du tronc, on tire des planches souples, appelées rapaka, avec lesquelles on fabrique le plancher.

Ravenala madagascariensis

mardi 12 février 2013

Le sphinx et l’orchidée : l'évolution prédictible


La coévolution existe dans les systèmes mutualistes, où chacun exploite l'autre. L'illustration la plus belle est celle des orchidées de Madagascar et de leurs papillons pollinisateurs. Les premières ont des tubes nectarifères de 30 cm de longueur et les seconds ont des trompes de 25 cm. L'allongement démesuré des nectaires et des trompes au cours de l'évolution est le produit de la coévolution de la longueur des nectaires des orchidées de Madagascar et des trompes des papillons pollinisateurs.

L'étoile de Madagascar (Angraecum sesquipedale) est une orchidée endémique de Madagascar, une épiphyte qui vit de l’humidité ambiante et se fixe sur un support avec très peu de substrat (arbres, rocher…). Sa couleur blanche permet d’attirer les papillons de nuit et principalement le papillon sphinx Xanthopan Morgani ‘Predicta’.

Découverte au siècle dernier, l'étoile de Madagascar  a longtemps excité l'imagination des botanistes qui s'interrogeaient sur l'incroyable éperon, long de 25 cm, qui pend sous le labelle et ne contient du nectar sucré qu'à son extrémité. La longueur du nectaire laissait présager l’existence d’un papillon possédant une trompe de la même taille. C’est la prédiction que fit Charles Darwin quand on lui présenta, en 1862, l’étoile de Madagascar, prédiction qui engendra le scepticisme chez beaucoup de scientifiques de son époque.
En 1903 la sous-espèce Xanthopan Morgani Praedicta fut décrite par Lionel Walter Rothschild (1868-1937) et Karl Jordan (1861-1959). Au repos, la trompe de ce papillon est enroulée 20 fois sur elle-même.Il fut tout naturellement appelé Predicta en hommage à Darwin qui avait prédit son existence.